#22

Jacques était un « scientifique ». Pas un chercheur, un gars en blouse et lunettes, que je sort jamais de son laboratoire, non. Mais sa vision du monde était celle d’un scientifique, nourrie du savoir acquis en de longues années d’étude.

Ainsi, devant la mer, il voyait une quantité astronomique d’eau, livrée à un mouvement perpétuel, déformée par les forces des vents et de gravitation. Les vagues étaient la matérialisation des ondes. Un coucher de soleil, un arc en ciel, le jeu de la réfraction. Les reflets d’une bulle de savon, les couleurs des ailes d’un papillon ? Des interférences. Le ciel étoilé était un théâtre gigantesque pour réactions nucléaires, relativité et attraction gravitationnelle. Quant à la vie, une affaire de réactions chimiques et électriques très complexes. Et toute cette matière, était faite de vide, dans lequel des myriades de particules élémentaires interagissaient entre elles.

Et tout cela formait son univers.

Certains trouveraient cette vision du monde trop technique, trop morne – trop triste, en somme. Mais elle donnait de l’assurance à Jacques. Elle lui permettait d’avancer en terrain connu, où chaque chose était à sa place, décrite, répertoriée. Ses connaissances lui donnaient des repères. Et voir le jeu de la science dans les phénomènes naturels ne leur ôtait ni leur force, ni leur beauté. Au contraire, cela permettait à Jacques d’apprécier l’œuvre de la Nature à sa juste valeur – lui qui avait tant de mal à ressentir vraiment.

Posté dans 2011 - Sans titre | Commenter

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