Isabelle avait été marquée par l’expression « combler le vide » qu’avait utilisé Denise. C’était anecdotique, et pourtant, Isabelle était persuadée – à tort ou à raison – qu’il y avait de lourds secrets derrière ces mots.
Elle s’était rendue compte que Denise était très secrète, et qu’elle la connaissait très mal. En particulier, elle ne savait rien de sa famille.
Au déjeuner, elle réussit à aborder le sujet.
– Oh, de famille… Mon mari était militaire… il a passé l’arme à gauche il y a cinq ans. D’enfants, j’en ai pas eu. ‘Pouvais pas.
Elle se mit ensuite à parler de ses propres parents, qui venaient du Nord. Son père avait travaillé aux chantiers de La Ciotat. Et Denise était devenue institutrice pour ne pas finir femme au foyer, à élever des gosses, comme sa mère.
Isabelle ne put rien apprendre d’autre d’intéressant. Elle avait le sentiment que la vieille dame avait habilement dévié la conversation, pour ne pas approfondir sur ce thème. Bien qu’elle ne fût pas anatomiste, Isabelle trouvait que Denise avait le physique d’une femme qui avait enfanté. Et cette manière de fixer la pomme de terre au bout de sa fourchette, quand elle avait abordé ce sujet, était suspecte.
Mais Isabelle n’avait aucun indice plus concret auquel se raccrocher, et ne voyait pas du tout où trouver plus d’informations.
Elle savait qu’il n’était jamais bon de remuer les secrets de famille. Mais sa curiosité était piquée au vif.