Isabelle aidait Denise à faire le ménage. C’était une vieille maison, et la poussière connaissait tous les recoins où se cacher. Cela lui permit d’explorer la maison de fond en comble. Deux pièces lui étaient strictement interdites d’accès : la chambre de Denise et le bureau.
Denise était une de ces vieilles dames qui savaient rester actives et joyeuses malgré l’âge. Elle avait un visage assez osseux, parcouru par de nombreuses rides. Mais elle gardait une attitude positive et énergique, qui la conservait bien. Elle était assez secrète : Isabelle n’avait rien pu savoir de son passé, de sa famille, et il n’y avait aucune photographie dans la maison.
A sa retraite, Denise s’était mise à la peinture. Mais ce n’étaient pas des bouquets de fleurs, ou des paysages, qu’elle représentait – comme bien des personnes âgées. Isabelle avait été stupéfaite en rentrant dans son atelier. C’étaient des toiles abstraites, d’une force émotionnelle impressionnante. Elle parvenait à transmettre de vrais sentiments dans ses jeux de couleurs et d’ombres – avec toujours un arrière-goût amer, un peu dérangeant. Comme si… comme si elle avait vendu son âme au diable, en échange d’un don artistique pensa sans le vouloir Isabelle.
Ses œuvres, elle les gardait avec elle. Elle avait bien essayé de les exposer dans la galerie du village, mais ils avaient refusé. Trop abstrait, disaient-ils. Isabelle lui avait proposé de contacter d’autres galeries dans les alentours, mais Denise n’était pas très enthousiaste. Elle n’avait pas l’air de vouloir se défaire de ses tableaux.