– C’était il y a sept ans, déjà. Ma sœur, en plein adolescence, rentrait de vacances avec mes parents. Et puis, soudain, un poteau d’acier s’est effondré sur la route.
» Mon père est mort sur le coup ; ma mère peu après. Restait Magda, qui n’avait que quelques égratignures – et une commotion cérébrale.
» Tout semblait aller très bien pour elle. Elle a passé quelques semaines dans le coma, mais, une fois réveillée, elle est redevenue bien vite l’adolescente qu’elle était : brillante, douce, adorable. Profondément affectée par la mort de ses parents, mais « sur la bonne pente ». Ils s’apprêtaient à la laisser sortir, quand sa première crise est arrivée.
» D’un instant à l’autre, elle était devenue folle : ultra-violente, agressive, comme enragée. Mais le pire, c’était qu’elle souffrait atrocement durant ses crises.
» On lui a fait passer tous les examens possibles et imaginables. Mais on n’a rien trouvé d’anormal, au moins sur le plan physiologique. On en a conclu à un problème psychologique.
» Elle a vu les plus grands psys, elle a suivi tous leurs traitements. Mais rien n’y a fait, et les effets secondaires avaient même tendance à aggraver son état. Certaines de ses crises lui affectaient même sa mémoire. L’espoir de retrouver une vie normale s’amenuisait, et son moral diminuait. Il n’y avait que dans son sommeil qu’elle était à l’abri de toute crise.
» Et puis, une nuit, j’ai rêvé d’elle. Ou plutôt, c’est elle qui s’est invitée dans un de mes rêves, et s’est mise à m’expliquer ce qu’elle avait découvert. Je t’ai dit qu’elle était très brillante : pendant son coma, elle avait réussi à « s’échapper » de son rêve, à pénétrer dans les coulisses du monde des rêves, à s’y faire des alliés et à comprendre une partie du fonctionnement des rêves.
» C’est là qu’elle m’a fait part de sa volonté d’être plongée dans un sommeil artificiel. Au moins jusqu’à ce qu’elle retrouve la force de se battre contre sa maladie.
» Elle m’a confirmé la chose, éveillée, le lendemain. Il a fallu ensuite convaincre le médecin de l’hôpital, sans lui en dire trop – il nous aurait pris pour des folles. Finalement, il a accepté. C’était il y a trois ou quatre ans.
» Parallèlement, avec l’aide de ma sœur, j’ai appris ce que je pouvais sur le monde des rêves, et je suis parvenu à entrer dans des endroits bien gardés, comme la zone topolonique.
» Le monde des rêves est longtemps resté un « terrain de jeu », où je pouvais retrouver ma sœur vivante et souriante. Et puis, on a peu à peu compris l’oppression que subissaient ses habitants. C’est là qu’on a décidé de faire naître une révolte.